SF — La trilogie Red Rising, on vous en a déjà parlé : elle est magistrale. J’ai même classé un de ses livres dans mes plus belles lectures de la décennie passée, rien que ça ! Pierce Brown déconstruisait la société en parlant de révolte et de guerre dans ses premiers romans. Dans la seconde trilogie, il faut maintenant reconstruire.
Si le premier tome, Red Rising, pouvait passer pour un récit young-adult, Dark Age, alias le livre V, est lui un récit résolument adulte, qui parle de guerre, de violence, et de la crise existentielle qu’on traverse parfois à la trentaine quand on se retourne et qu’on regarde derrière soi. On tombe ici dans de la SF pure et dure, dans du space-opera à grand spectacle. Cela peut déstabiliser, si on s’attendait à retrouver le côté dystopique du tout premier volume.
Dark Age est déconcertant à de multiples points de vue : c’est difficile de se replonger dans l’univers de Pierce Brown après trois ans d’interruption. Les très (trop ?) nombreux personnages ont beau être rappelés en début de livre, on s’y perd volontiers. La plupart des enjeux, notamment politiques, peuvent égarer le lecteur en l’absence d’une relecture des tomes précédents avant d’aborder le nouveau volume. Je l’avoue, je n’ai pas pris la peine de le faire, et du coup j’ai franchement peiné le premier tiers du roman. C’est indubitablement une série qu’il vaut mieux enchaîner si on veut pleinement l’apprécier : elle est exigeante, et demande de la concentration, un engagement total.
Le roman, comme son nom l’indique, est sombre. Il parle d’idéaux piétinés, de concessions douloureuses, de dilemmes inhumains, du pragmatisme de la guerre. Violence, mort, viol, torture : avec tous ces thèmes en toile de fond, l’écriture de Pierce Brown est loin d’être tendre, elle est tendue, nerveuse et ne fait aucune concession. Et au milieu de tout ça émerge comme toujours la personnalité quasi divine, autrefois vengeresse, de Darrow, le Rouge devenu Or, l’esclave devenu l’homme le plus important de la République. Darrow hésite. Il doute. Parfois, il commet des erreurs. L’homme s’efface face au chef de guerre. Le père disparaît derrière le général. L’époux se volatilise derrière la figure légendaire… Le processus est fascinant à observer !
Est-ce que c’est bien ? Oui ! C’est ambitieux, c’est dense, c’est brillant ! C’est de la science-fiction pleine de profondeur, et les fans du genre prendront leur pied… à la condition de s’y consacrer pleinement et d’avoir le tome précédent bien en tête. Quand Star Wars rencontre Game of Thrones, ça fait forcément des étincelles !
Dark Age partie 1, Pierce Brown. Hachette romans, 2022. Traduit par Hélène Lenoir.
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