HISTORICO-FANTASTIQUE — Au bout de cinq tomes, se lasse-t-on de l’épique saga de la famille Caskey ? Que nenni ! Avec un talent de conteur incroyable, Michael McDowell sait toujours lancer de nouvelles pistes et parvient toujours à maintenir l’intérêt du lecteur…
Attention, cet article comporte des spoilers sur les quatre tomes précédents.
La seconde guerre mondiale s’est terminée et une nouvelle ère s’ouvre pour la famille Caskey. L’ancienne garde a laissé placé à une nouvelle génération d’adultes. Ce roman fait donc la part belle aux jeunes Caskey, Miriam et Frances en tête. L’une s’épanouit dans les affaires et portera, avec l’aide de son beau-frère et grâce aux intuitions surnaturelles de sa mère, le clan à un niveau inégalé de richesse. L’autre entame avec bonheur sa vie conjugale. Bonheur, vraiment ?
L’argent fait-il le bonheur ? C’est probablement la question qui sous-tend tout ce tome, intitulé à raison La Fortune. La famille Caskey se découvre riche, grâce à Billy, le nouveau gendre qui, pour se rendre utile, met de l’ordre dans les finances de l’ensemble de la tribu. Mais Miriam ne compte pas se contenter d’être « riche » : elle veut toujours davantage, elle veut être richissime. Ça tombe bien, Elinor a le sentiment que les terres de la famille recèlent du pétrole…
Alors qu’une des filles Caskey se démène en quête de l’or noir, la deuxième semble se perdre de plus en plus dans les eaux de la Perdido. Si Miriam est normale, Frances, elle, ne l’a jamais été et quoi que soit exactement leur mère Elinor, Frances l’est également. Si la jeune femme a toujours éprouvé un lien très profond avec la vie terrestre, avec Perdido, avec ses proches, la maternité semble la faire basculer progressivement vers son identité aquatique. Son dilemme, l’expression de ses sentiments, le trouble qui l’envahit sont admirablement bien rendus, et une profonde mélancolie sourd du récit, comme un contre-poids à la frénésie pétrolière qui occupe les autres membres de la famille.
Véritable ode à la différence, et à la tolérance, le discours d’Elinor pousse Frances à finalement s’accepter… jusqu’à une fin renversante qui, une nouvelle fois, va chambouler le quotidien de la famille Caskey. Le pragmatisme de la première partie est submergé par l’émotion de la suite des événements : ce bel équilibre prouve une nouvelle fois l’étendue de la palette des talents de Michael McDowell, admirable conteur, maître de l’horreur et docteur ès sentiments quand il le faut.
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