BANDE-DESSINÉE JEUNESSE — On avait (re)découvert avec plaisir en fin d’année dernière les deux premiers tomes de l’adaptation en BD de la série Quatre sœurs de Malika Ferdjoukh, sous les pinceaux de Cati Baur, sous format d’intégrales regroupant les tomes deux par deux. Après avoir lu les histoires des deux cadettes, passons aux deux sœurs “du milieu” : Bettina et Geneviève.
Le printemps, saison du renouveau, des amours et des primeurs, éclate dans toute sa splendeur à tous les étages de la Vill’Hervé. Renouveau ? Oui. Harry et Désirée, les petits cousins, viennent passer des vacances au grand air. Charlie, à sec, s’est résignée à louer la chambre des parents. Le locataire s’appelle Tancrède, il est jeune, célibataire, drôle, fabricant d’odeurs bizarres. Et beau.
Primeurs ? Trop. On retrouve des poireaux nouveaux partout, dans la soupe, coincés dans un cadre de tableau et même dans le pot d’échappement de la voiture de Tancrède. Toujours lui.
Amours ? Hélas. Tancrède sème le trouble et récolte la tempête dans le cœur de Charlie. Bettina se languit du très très moche et si splendide Merlin. Hortense découvre que les règles peuvent être autre chose que « l’ovule non fécondé et les structures endométriales se font la malle, Chantal ». Enid fait des confidences. Geneviève se tait. Et Mycroft, le rat, qui tombe amoureux à son tour…
Comme dans les deux opus précédents, une sœur est à l’honneur, mais les arcs narratifs secondaires nous permettent de suivre tout ce qui arrive aux autres. Alors que Bettina dépérit en pensant à Merlin, ses sœurs vivent leurs vies respectives : Geneviève gère la logistique, Enid présente Swift la chauve-souris aux cousins, Hortense écrit fébrilement à Muguette, et Charlie… Charlie est en plein doute. Au final, c’est presque son histoire à elle qui prend le plus de place dans le récit, tant elle impacte celles de ses cadettes ! En effet, les émois et peines de cœur de Charlie poussent ses sœurs à s’interroger sur un tas de choses. On est donc bien loin de l’image mièvre et dégoulinante de l’amour, bien que celui-ci soit au centre du récit !
La présence des deux petits cousins, jamais avares de bêtises (entre la distribution de poireaux partout dans la maison et l’élevage de cafards clandestin), apporte une petite touche d’humour bien appréciable et qui concourt à créer une ambiance pleine de tendresse.
Après le printemps vient l’été, et le second tome de cette intégrale ! L’été a presque vidé la Vill’Hervé. Hortense et Enid sont à Paris dans le moins deux pièces de leur tante Jupitère et de leurs cousins Désirée et Harry. Bettina est partie camper à la campagne avec les DBB, chez une cousine inventée pour la circonstance. Charlie est là, mais ailleurs. Dans l’inquiétude du lendemain, sans doute. Dans la nostalgie de l’hier avec Basile, peut-être aussi. Geneviève, elle, vend des glaces à la plage en regardant passer les bateaux, les pédalos, les cumulos (nimbus) et surtout le mystérieux Vigo qui a commencé par se renverser en vélo devant elle et qui la renverse à son tour… Ce n’est pas le seul garçon irrésistible de ce dernier épisode, d’ailleurs. Il y a Augustin, l’homme qui met dans sa poche des tas de bêtes : moineaux, canards et autre Bettina ; il y a l’inspecteur Valéry Clotilde ; sans compter quelques revenants dont le Gnome de la Chasse d’Eau qui lui non plus n’est pas vilain de sa personne.
Cette fois, c’est au tour de Geneviève d’être au centre de l’histoire. Les sœurs étant éparpillées pour ces vacances, le récit est monté comme un kaléidoscope, suivant tour à tour les différentes sœurs dans leurs aventures estivales – Geneviève en tête, donc. L’histoire a commencé par la plus jeune, et s’achève sur celle de la sœur la plus âgée : lorsque le ténébreux (et si mystérieux) Vigo entre en scène, il n’est donc pas seulement question d’aller manger des glaces ensemble ! Bien que les glaces aient un rôle central puisque, cet été, c’est Geneviève qui est chargée de les vendre devant la plage.
Il y a un côté plus grave, plus sombre dans ce récit que dans les précédents, sans que le récit perde complètement son ambiance tendre et chaleureuse : les sœurs ont tout simplement grandi au cours de cette année, et leurs préoccupations ont évolué !
Ce dernier tome est aussi celui qui est le plus riche en scènes trépidantes et/ou stressantes ! Il y a du mystère, on mène l’enquête dans son coin, le tout sur un rythme qui rend l’album difficile à lâcher : on aimerait détailler un peu plus, mais ce serait un peu dommage de divulgâcher. Sachez que l’aventure estivale de Geneviève, comme les pérégrinations de ses sœurs ne leur promettent pas un été de tout repos !
Comme toujours, le récit mêle émotions, tendresse et humour (souvent assumé à ses dépens par la terrifiante tante Lucrèce que l’on adore voir être légèrement maltraitée par les événements). Le tout parfaitement mis en dessins par Cati Baur, qui donne là au texte un superbe écrin !
C’est la fin de cette adaptation, et c’est un crève-cœur de tourner la dernière page, tant suivre les aventures de ces cinq sœurs a été à la fois prenant et émouvant. La mise en dessins et en couleurs de Cati Baur est sublime, et retranscrit à merveille les ambiances des différents albums (à la fois en termes de saison et d’atmosphères différentes). Si vous n’avez pas encore découvert cette série, que ce soit en romans ou en BD, ne ratez pas l’occasion de les lire sous ce format d’intégrales !
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