Brandon Sanderson, vous connaissez ? Cet auteur extrêmement prolifique a plusieurs séries de fantasy à son actif : Alcatraz au rayon jeunesse, Elantris et Fils-des-Brumes au rayon adulte pour ne citer qu’elles. Vous le connaissez peut-être aussi pour sa reprise de La Roue du Temps : suite au décès de l’auteur, Robert Jordan, c’est Sanderson qui a repris la série. Vous l’aurez compris, Brandon Sanderson n’est pas un novice en matière d’écriture, encore moins en fantasy. Et il nous le prouve avec sa série qui débute tout juste au Livre de Poche : Les Archives de Roshar.
Cette série, Sanderson travaille dessus depuis les années 90 ; peu satisfait de ses résultats, il a réécrit, développant les différents niveaux d’intrigues, creusant l’univers et les personnages, allant même jusqu’à jeter ses brouillons et premiers jets pour tout reprendre à zéro. Les Archives de Roshar est un projet ambitieux. Le premier volume fait quelques 1 000 pages en VO et a été traduit, en français, dans deux petits briques de respectivement 762 et 666 pages. A croire que l’auteur est en train de réaliser son grand rêve épique !
Épique, c’est bien le terme adéquat pour qualifier ce début de série.
On suit plusieurs personnages. Il y a, tout d’abord, Kaladin Béni-des-foudres, jeune soldat talentueux qui se retrouve bientôt réduit en esclavage, le front barré de la mention « dangereux », affecté au Pont Quatre de la gigantesque armée du clarissime Sadeas, laquelle côtoie les neuf autres armées des hauts-princes aléthis. Il y a Szeth, un assassin redoutable, soumis par ses maîtres, obligé de commettre toujours plus de meurtres en souillant ses lames. Il y a Dalinar, un haut-prince aléthi, qui a le déplaisir de côtoyer Sadeas (mais pas Kaladin), puisque son armée est, elle aussi, dans les Plaines Brisées. Les armées aléthies, réunies autour du roi Elhokar, se chargent d’attaquer l’ennemi, le peuple des Parshendis, qui ont fait assassiner Gavilar, le roi précédent, père d’Elhokar et frère de Gavilar. Mais plutôt que d’attaquer toutes en même temps, unies (le rêve de Dalinar !), les armées font la course entre elles et attaquent tour à tour.
Enfin, il y a Shallan, jeune fille de bonne famille, qui cherche, pour des motifs peu avouables, à devenir l’apprentie de Jasnah, une hérétique notoire mais respectée, sœur de Dalinar.
Vous êtes perdus ? Vous n’avez encore rien vu ! Car l’entrée dans l’univers de Sanderson est assez brutale. Sans prendre de pincettes, il nous parle de la faune, de la flore, des multiples royaumes et peuples qui se partagent Roshar, des Cuirasses et Lames d’Éclat, ces fabuleuses armes et armures tellement rares et prisées qu’on échange des vies ou des royaumes contre elles, ou encore de la Fulgiflamme, cette drôle de magie en vogue. La plongée est intégrale. Mais c’est là que Sanderson est très fin : certes, sur les tous premiers chapitres, on se sent un peu submergés. Mais il nous amène exactement là où il le souhaite : sans s’embarrasser de longs discours didactiques et présentatifs assommants, il parvient tout de même à rendre tout cet univers extrêmement complexe parfaitement intelligible ! De plus, son style est d’une fluidité bien agréable : on ne voit pas passer ces quelques 700 pages mettant en place l’univers et le roman se lit presque tout seul.
Côté intrigue, si l’on résume, on suit quatre arcs narratifs plus ou moins liés les uns aux autres. Szeth est l’assassin insaisissable qui a raccourci la vie de Gavilar. Dalinar, le frère de Gavilar, est un haut-prince aléthi : il soutient son neveu Elhokar, le nouveau roi, mais s’intéresse de très près à la philosophie de vie qui passionnait Gavilar dans ses dernières années, même si ses nouvelles croyances lui valent la méfiance de ses pairs. Parmi ceux-ci, Sadeas, le nouveau maître de Kaladin, lequel aimerait bien s’affranchir. Quant à Shallan, elle est liée à Jasnah, la propre sœur de Gavilar et Dalinar, Finalement, tout le monde tourne autour de la figure du défunt roi. Et les croyances qui l’intéressaient tant sur la fin de sa vie prennent de plus en plus d’importance.
Comme la traduction était conséquente, l’éditeur a choisi de séparer le roman en deux, en suivant les recommandations de Sanderson : ainsi, le volume dispose d’une fin très satisfaisante, mais nous laisse tout de même en pleine expectative, avec l’envie de lire la suite !
Brandon Sanderson a travaillé pendant 10 ans sur cette série et ce premier tome explique largement pourquoi ça lui a demandé autant de temps. L’histoire est extrêmement dense, les personnages très fouillés, l’univers tellement étendu qu’on se demande si on en a seulement vu 10 %. Mais là où cela devient magistral, c’est que ce n’est, d’une part, jamais pesant et, d’autre part, extrêmement fluide. Voilà une excellente découverte rayon fantasy, qui s’annonce tout simplement passionnante !
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