FICTION HISTORIQUE — Aliénor d’Aquitaine … son souvenir est encore vif malgré les huit siècles qui nous séparent d’elle, qui plus est en Aquitaine où de nombreux établissements portent son nom. Il y a quelques mois, nous l’avions découverte reine de France et avide de faire ses preuves dans le premier tome de la trilogie qu’Elizabeth Chadwick lui a consacrée. Mariée à 15 ans au Roi de France, elle l’accompagne quelques années plus tard dans le cadre de la deuxième croisade. À leur retour et à la stupéfaction de tout le monde, elle demandera — et obtiendra — le divorce et se mariera dans la foulée avec le jeune Henri, duc de Normandie et héritier du royaume d’Angleterre. Commence alors un tout nouveau chapitre, entre l’Angleterre, la Normandie et l’Aquitaine.
Aliénor est couronnée reine d’Angleterre aux côtés de son époux, le jeune Henri II Plantagenêt : elle est désormais l’une des femmes les plus puissantes d’Europe. Et elle est bien décidée à ne pas reproduire les erreurs de son premier mariage. Tandis que Henri part en guerre contre les ennemis de la Couronne afin d’asseoir son autorité, Aliénor se révèle une souveraine active sur tous les fronts. Infatigable, elle enchaîne les déplacements et traverse sans cesse la Manche, pour aller et venir entre les trois provinces de son Royaume, à la rencontre de son énergique et colérique mari. Contrairement à sa première union qui n’a donné que deux filles au roi de France, ce second mariage est plus que fertile avec huit enfants en moins de 13 ans !
Mais bientôt délaissée par Henri, qui lui préfère sa jeune amante, Aliénor se voit peu à peu dépossédée du pouvoir qui était sien. Ses garçons devenant des hommes, la rébellion commence à couver au sein de la famille royale. Commence alors un combat d’un genre nouveau.
Le vrai talent d’Elizabeth Chadwick, c’est de savoir mêler destins personnels et événements historiques avec brio. Elle nous livre comme toujours un récit humain et intimiste, centré sur les personnages plutôt que sur les événements géopolitiques de cette période compliquée. Mais c’est pour finalement mieux comprendre les rouages de l’Histoire, en la vivant de l’intérieur. En posant soigneusement son contexte, elle nous permet de suivre le cheminement de pensées d’Aliénor ou bien encore de Henri. Il est alors fascinant d’observer
leur lente descente aux Enfers et leur inimitié grandissante. On comprend ainsi mieux comment ce mariage a pu finir par un tel fiasco alors qu’il semblait avoir commencé sous les meilleurs auspices.
Dans le même ordre d’idée, on peut observer les relations entre Henri et Thomas Beckett, qui fut tout à la fois chancelier du Roi et Archevêque : une double charge impossible à porter, qui signa la fin de l’amitié entre les deux hommes. Leur conflit a par la suite pris une proportion démesurée et a fait grand bruit au Moyen-Âge, pour se solder par le sauvage assassinat de l’homme d’Église. Et c’est une fois de plus intéressant de ne pas se contenter des bribes d’évènements rapportées par l’histoire. Alors certes c’est romancé, mais cela apporte une perspective nouvelle sur des évènements maintes fois relatés.
Toujours dans cette idée de perspective, l’autrice choisit également de donner un autre point de vue sur la révolte de 1173 et dédouane quelque peu Aliénor de son accablante histoire. Car les légendes ont la vie dure et la reine déchue n’est sans doute pas la seule et cruelle instigatrice du complot mis en place par trois de ses fils contre leur père Henri II.
Bref, l’Histoire accessible et romancée comme on l’aime, pour approfondir nos connaissances sur la vie d’Aliénor d’Aquitaine. On recommande chaudement et on attend la suite avec impatience, afin de découvrir le dernier chapitre de sa vie.
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