Divergente arrive enfin en poche ! Retour sur la trilogie…

DYSTOPIE — Eh oui, c’est une sacrée bonne nouvelle pour tous les lecteurs qui n’ont pas encore découvert la célèbre trilogie de Veronica Roth : depuis deux jours, elle est désormais disponible au format poche, ce que les lecteurs étaient nombreux à attendre. Énorme succès de librairie (la trilogie s’est écoulée à plus d’un million d’exemplaires en grand format !), boostées par la sortie des films en salles (nous vous vous avons notamment parlé du premier, ou du troisième), les aventures de Tris sont désormais accessibles au plus grand nombre.

Du coup, je me suis souvenue de ma propre découverte de ces romans. Dès sa sortie chez Nathan, le premier volume a beaucoup fait parler de lui, et l’enthousiasme était communicatif. De passage dans un Barnes & Noble lors de vacances en Louisiane, j’ai craqué et acheté le premier tome, dévoré dans la foulée. Je vous en dis un peu plus…

Divergente, de quoi ça parle ?

Béatrice a seize ans et est sur le point de faire un choix qui va déterminer tout le reste de sa vie. Dans le futur lointain dans lequel vit la jeune fille, la population est divisée en cinq factions. Votre faction conditionne votre manière d’agir au quotidien, votre apparence, votre personnalité, votre travail et vos relations. Vous ne pouvez pas en changer, hormis à l’âge de seize ans, après un test qui détermine quel trait de personnalité est le plus marqué chez vous, afin de vous aider à choisir votre caste. Si vous êtes désintéressé et tourné vers les autres, vous rejoindrez les Altruistes, qui nient leur identité pour le bien des autres.  Si l’honnêteté prime sur tout dans votre système de valeurs, vous serez un Sincère. Si la soif de la connaissance vous anime, vous serez un Érudit, et serez médecin ou professeur. Si vous êtes particulièrement gentil et aimant, vous serez Fraternel, et serez en charge des fermes. Enfin, si vous êtes particulièrement tête brûlée, vous serez Audacieux, une caste de soldats. Béatrice a grandi au sein des Altruistes mais quand vient le grand test, ses résultats ne sont pas concluants. Elle est divergente, correspond aux critères de plusieurs groupes sociaux. Or, être divergent dans une société où tout est réglé, c’est s’exposer à de grands dangers…

Divergente, Veronica Roth, PKJ

Un roman d’apprentissage sur fond de dystopie

Dynamique et pourtant très creusée, l’intrigue de Divergente allie un arrière-plan dystopique, au ressort toujours apprécié de la découverte d’une nouvelle communauté (à la manière d’Harry Potter ou de Night School, l’héroïne doit s’habituer à un nouveau cadre d’ordre quasi-scolaire). Ces deux éléments liés permettent aux protagonistes d’évoluer au fil des pages. Béatrice est au début une jeune fille un peu effacée, bien que dotée au fond d’elle d’un caractère de feu. Elle devient peu à peu de plus courageuse et affirmée, en apprenant à s’adapter au fil du livre aux vices de l’espèce humaine (jalousie, mépris, haine) et aux règles d’une compétition virulente (coups bas, intimidation…). Très tôt, Béatrice est confrontée à des choix. Le premier est peut-être le plus déchirant : doit-elle rester auprès des siens, dans une caste qui ne lui correspond pas et ne jamais être vraiment épanouie, ou tenter l’aventure auprès des Audacieux, cette faction qu’elle observe depuis toujours avec envie, reniant ainsi sa famille ?

Le système des castes permet à l’auteur d’aborder des questions politiques et morales : doit-on rechercher le confort et l’enrichissement ou se consacrer à autrui ? Peut-on vivre sans véritable démocratie, quand un pays est gouverné par une seule catégorie de personnes, dont le but n’est pas le même que celui du reste de la population? Un individu peut-il être entièrement conditionné par son environnement ? La quête de soi et le passage à l’âge adulte (choix d’une profession, conflit avec les parents, premiers émois) sont au centre du roman.

Les rivalités adolescentes au coeur du récit

Rejoindre une faction n’est pas que faire un choix : il faut s’y tenir, et s’accrocher pendant la période d’initiation. Si vous n’êtes pas assez bon, vous risquez d’être mis au ban de la société, et de devenir pauvre et seul. Cette menace plane au dessus de Béatrice, rebaptisée Tris, tout au long du livre. La compétition est donc des plus rudes : des inimitiés apparaissent dès le premier jour, et des amitiés se nouent. Mais ces amitiés ne sont jamais tout à fait évidentes, et la jalousie ne reste jamais bien longtemps en dehors du tableau.  Les amitiés peuvent basculer très vite, dans l’amour comme dans la haine. Ce portrait en demi-teinte des relations adolescentes, exacerbées au possible pour les besoins du roman, est bien plus juste que celui dressé dans la plupart des romans pour adolescents. Les relations humaines sont complexes, et Veronica Roth parvient à le montrer avec beaucoup de réalisme. Elle ne recule pas devant la violence et surprend son lecteur qui apprécie de ne pas être ménagé, voire parfois choqué. La tension est omniprésente. Il devient de plus en plus difficile de lâcher le roman.

Divergente, Veronica Roth, PKJ

Un tome 2 qui fait tout basculer…

L’Insurrection est plus sombre que le premier tome, qui posait les bases d’un univers et restait relativement bon enfant. L’atmosphère presque joyeuse et scolaire à la Harry Potter n’est plus. Tris et Tobias sont en guerre. La mort, la violence, et les sacrifices font partie intégrante de l’intrigue de ce deuxième tome. Mais cette violence est traitée de manière intelligente : Tris a dû commettre malgré elle quelques actes dont elle n’est pas fière, pour survivre, et elle subit le contrecoup de ce traumatisme. Veronica Roth dépeint avec réalisme et justesse les différents stades que traverse la jeune fille : culpabilité, deuil, acceptation. L’action s’enchaîne très vite, et Tris a très peu le temps de s’apitoyer sur elle-même. Pourtant, les proches qu’elle a perdus ne quittent pas son esprit. Sa relation avec Tobias est en dents de scie : dans un environnement aussi instable, il est difficile d’accorder sa confiance, et d’admettre à quelles extrémités on a été poussé. Tris a honte et se sent extrêmement coupable d’avoir dû abattre un de ses amis. Le lecteur sait bien que c’était lui, ou elle, et qu’elle n’a agi que par légitime défense. Mais la jeune fille se torture, et peine à admettre son acte à Tobias. Son éducation altruiste entre en conflit avec son instinct de survie. Les dilemmes qui agitent la jeune fille font de ce roman un texte très fort. Tobias, lui, se révèle davantage, et ses faiblesses rendent sa personnalité toujours plus complexe.  Il devient plus sûr de lui et accepte enfin son rôle de leader au sein de sa communauté. Les évènements le poussent à côtoyer son père, qu’il déteste, ajoutant à la tension du récit.

Veronica Roth ne laisse aucun répit à son lecteur : elle donne à son récit une profondeur plus intense, et développe les idées évoquées dans le tome 1. Si on aime un poil moins que Divergente, sans doute parce que l’effet de découverte est passé, on est tout de même happé par le récit, et extrêmement séduit par cet univers. L’auteur a su se renouveler et exploiter les vices humains, la convoitise et la quête de pouvoir, pour construire un personnage de méchant très convaincant, mais également une intrigue et des rebondissements qui tiennent la route.

Divergente, Veronica Roth, PKJ

Au-delà du mur : le temps des révélations

Difficile de vous en dire plus sans vous gâcher le plaisir de la découverte ! Dans le troisième et dernier tome de la série, Veronica Roth ne ménage certainement pas son lecteur, avec des révélations en pagaille et une fin, osons-le, relativement choquante. Tris est amenée à remettre en question tout ce qu’elle a toujours cru, l’histoire familiale comme celle de sa communauté. Si le suspense est au rendez-vous, on reste tout de même sur notre faim. Au-delà du mur est loin d’être aussi bon que les deux tomes précédents (et on ne vous parle même pas de l’adaptation cinéma catastrophique), et on est quelque peu déstabilisé par le choix d’une double-narration, inédit jusque là. Toutefois, on est certain d’une chose : Veronica Roth est désormais un auteur à suivre, et c’est avec plaisir et beaucoup d’attentes qu’on se penchera sur sa nouvelle série, Marquer les ombres (dont le premier volume est sorti en début d’année chez Nathan).

Divergente (3 tomes), Veronica Roth. PKJ, 1er juin 2017. Traduit de l’anglais par Anne Delcourt.

A propos Emily Costecalde 1154 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

1 Commentaire

  1. Ha mais ils ont enfin mis des titres de parties !! J’avoue que ça manquait salement dans l’édition GF (Divergent ou Divergente, ça dépendait des fois, puis 1, 2, 3, c’est d’un banal….).
    J’avais bien aimé le début de la trilogie mais ensuite j’ai trouvé que ça allait de mal en pis. Additionné au jeune âge de l’auteure, je me suis dit que ça valait le coup d’attendre quelques années pour lire ses prochains romans. Pour ce qui est des films… no comment, en effet !

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