Pays rouge : de la dark fantasy sauce western !

Pays rouge, Joe Abercrombie, Milady

FANTASY — Joe Abercrombie est un grand nom de la fantasy anglosaxonne, récompensé notamment d’un prix Locus et qualifié de « l’étoile la plus brillante de la nouvelle génération d’auteurs de Fantasy britannique » par le Times, rien de moins.

Pays rouge est l’histoire de Farouche Sud, une jeune femme qui aurait aimé oublier son passé une fois pour toutes. Malheureusement, une bande de hors-la-loi trouve judicieux d’enlever son frère et sa sœur. Bien décidée à les retrouver, elle renoue avec ses anciennes habitudes, en compagnie de Placide, son père adoptif, un vieux Nordique qui porte bien son nom mais qui, contrairement aux apparences, porte également en lui quelques démons, qui ne demandent qu’à se révéler dans les difficultés.

Pays rouge s’inscrit dans le même univers que Servir froid et Les Héros, mais chaque tome peut être lu indépendamment. Ici, la magie est quasiment absente de l’univers : à vrai dire, elle est à peine évoquée comme existant quelque part dans l’univers, mais on ne la voit jamais à l’œuvre. Non, ici, ce qui prime, c’est l’aspect western de l’intrigue. Car dès l’instant où Farouche Sud et Placide sont engagés dans leur périple, il est impossible de nier cette facette de l’histoire : on trouve des pionniers à la recherche de meilleures terres, des prospecteurs en quête d’or, des mercenaires un brin destructeurs en goguette et, bien sûr, les inévitables « sauvages autochtones » fermement opposés à la présence de tout ce petit monde.
Le côté western ne serait sans doute pas complet sans la quête vengeresse qui anime Farouche Sud et Placide : celle-ci est là, dans la majeure partie du roman, mais seulement comme toile de fond. En effet, tous deux sont partis sur les traces des voleurs d’enfants, d’abord au pas lancinant de leur paire de vieux bœufs puis au rythme indolent de la caravane de pionniers menée par Dab Accort, le célèbre guide et Roche Pleureuse, sa non moins célèbre (et très taciturne) compagne.

Pays rouge, Joe Abercrombie, Milady

Mais on ne s’ennuie pas pour autant, loin de là : car leur voyage, du petit bled d’Équitable en Pays Proche aux contreforts de Fronce, en Pays Lointain, est loin d’être de tout repos. Il leur faut déjouer des embuscades, se garder des traquenards de la route (rivières en crues, attaques et autres tempêtes), tout en tâchant de ne pas se perdre soi-même (sans doute le point le plus ardu de toute l’entreprise).

Celle-ci, extrêmement difficile, soumet les personnages à une forte pression : les portraits qu’en tire Joe Abercrombie sont d’une incroyable justesse, ce qui fait qu’on adhère sans sourciller à tout ce qu’il nous narre. Mieux : on se retrouve à apprécier un peu tout le monde (dans des proportions différentes, évidemment!), malgré les travers des uns et des autres. Difficile, en effet, de ne pas en arriver à apprécier le pathétique sublime d’un Cosca, le sang de glace du maire ou le côté sympathique (quoique pas toujours bien courageux) de Temple (qui s’approche le plus du citoyen lambda dans cette clique de doux dingues).

Leurs caractères bien trempés vont de pair avec l’intrigue, sise dans un environnement ô combien difficile. Les péripéties vont rarement vers le mieux ou les accalmies : l’histoire tourne même assez souvent à la violence extrême et à la sauvagerie pure (à ce titre, âmes sensibles : s’abstenir). Mais cela crée une ambiance survoltée et absolument palpitante, qui fait que, malgré les quelques 600 pages, on ne voit pas le temps passer.

Pays rouge offre donc une intrigue de dark fantasy rondement menée dans un univers western de la plus belle eau : l’histoire, les personnages et les paysages sont âpres à souhait et contribuent à créer une atmosphère hautement prenante !

Pays rouge, Joe Abercrombie. Milady, 22 septembre 2017. Traduit de l’anglais par Juliette Parichet.

A propos Oihana 711 Articles
Lectrice assidue depuis son plus jeune âge, Oihana apprécie autant de plonger dans un univers romanesque, que les longues balades au soleil. Après des études littéraires, elle est revenue vers ses premières amours, et se destine aux métiers du livre.

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