Puisque mieux vaut tard que jamais (juste à temps pour le mois de l’imaginaire qui plus est !), voici un aperçu de la moisson de livres qu’il était possible de faire aux Imaginales, le festival des littératures de l’imaginaire qui prend tous les ans ses quartiers à Épinal. Café Powell est allé y faire un tour pour vous !
Le garçon et la ville qui ne souriait plus – David Bry
David Bry a été nommé coup de coeur des Imaginales 2019. C’était donc l’occasion rêvée pour le festival de mettre cet auteur en lumière, et pour nous, de découvrir ses dernières parutions. Et notamment son dernier roman jeunesse, Le Garçon et la ville qui ne souriait plus, paru en janvier 2019, qui a de sérieux airs d’uchronie !
Paris, 1858, sous le règne de Nicéphore le IIIème. Romain, quinze ans, vient des beaux quartiers de la capitale. Mais toute les nuits, il quitte le confort de son lit douillet et confortable pour rejoindre en secret la Cour des Miracles et les ruines de Notre-Dame. Depuis les nouvelles lois promues par l’Église, c’est là que vivent tous les anormaux – fous, difformes, obèses, et autres parias. Un soir, le jeune homme, qui n’est autre que le fils du chef de la police, découvre qu’un terrible complot vise à éliminer la Cour des Miracles et tous ses habitants. À l’aide de son meilleur ami Amboise et des figures emblématiques de la Cour, parviendront-ils à lever le voile sur la conjuration et à sauver les anormaux ?
C’est une très belle découverte que ce roman jeunesse qui nous propose une réflexion sur l’adolescence et la difficulté d’être soi, de s’assumer et d’être fier de ses différences. Il transmet également de très belles valeurs empruntes de libertés et de tolérance, le tout dans un Paris fantasmé inspiré de celui de Notre-Dame-de-Paris. Le lecteur averti déplorera malheureusement un petit manque de profondeur des personnages comme des péripéties, qui passera sans aucun doute inaperçu chez les plus jeunes lecteurs plus férus de rebondissements et moins de psychologie !
Le Garçon et la ville qui ne souriait plus, David Bry. Lynks, janvier 2019.
Mers Mortes – Aurélie Wellenstein
Aurélie Wellenstein a elle aussi été coup de coeur des Imaginales, en 2017. Après Le Roi des Fauves et Le Dieu Oiseau, nous découvrons aujourd’hui sa dernière parution intitulée Mers mortes, et c’est plutôt d’actualité !
Dans un futur pas si lointain que cela, les mers et les océans ont disparu. Et avec eux, tous les animaux marins sont morts. Ils ont été remplacés par des marées fantômes qui déferlent à intervalles réguliers sur le monde et qui charrient les spectres vengeurs de toute la faune marine décimée. Méduses, squales et autres poissons cherchent vengeance en arrachant l’âme des hommes pour la dévorer. Seule une poignée d’individus est en mesure de les arrêter : ce sont les exorcistes. Oural est l’un d’entre eux. Sa mission est de protéger les habitants de son bastion contre les grandes marées. Jusqu’au jour où un bateau pirate dirigé par le tumultueux Bengale accoste et kidnappe l’exorciste. Commence alors un voyage forcé vers le grand Nord à travers les mers mortes. Mais quel est donc l’objectif de Bengale ? Y-a-t-il encore un espoir pour les océans ?
Bien qu’un peu moins dans la torture psychologique que ses romans précédents (encore que !), Mers mortes s’illustre plutôt par son côté prophétique. Écologiste convaincue, Aurélie Wellenstein met alors le lecteur face aux maux d’aujourd’hui : pollution, réchauffement climatique, surpêche, disparition de la diversité animale. Et c’est un mal nécessaire pour une prise de conscience à travers ce récit post-apocalyptique. Le talent de conteuse de l’autrice n’est plus à démontrer, et si ce n’est pas un coup de coeur ultime et absolu (sans doute la faute à l’effet légèrement culpabilisant), cela reste une très bonne lecture.
Mers mortes, Aurélie Wellenstein. Scrineo, avril 2019.
Que passe l’hiver – David Bry
Nous avons aussi voulu découvrir le roman de fantasy de David Bry, aux accents plus nordiques et beaucoup plus tragiques que son roman jeunesse.
Stig est le fils cadet du chef de clan Feyren. Mal-aimé et méprisé par son père à cause de sa difformité, il est né vingt ans plus tôt avec un pied bot, mais aussi avec la magie de son clan qui lui permet de se transformer en corbeau. Il est temps pour lui de se rendre enfin sur le Wegg, l’étrange montagne où réside le roi de la Clairière, afin de participer pour la première fois aux festivités qui doivent marquer son passage à l’âge adulte. Mais son premier solstice d’hiver ne se déroule pas comme il l’avait imaginé. À peine le temps de découvrir les membres des trois autres clans et de s’enthousiasmer pour les contes, les danses et les festins que l’un des seigneurs présents s’écroule brutalement, sans doute empoisonné. Les augures sont néfastes et les fils du destin tissent un avenir que personne, ni homme ni dieu, ne semble pouvoir prédire. Menacé sans qu’il en comprenne la raison, Stig aura fort à faire pour découvrir ce qui se trame dans l’ombre des festivités, protéger ceux qu’il aime… et même survivre. Y parviendra-t-il ? Saura-t-il expliquer tous ces morts ?
Que passe l’hiver est sans aucun doute un OLNI (objet littéraire non identifié), mais d’une beauté et d’une poésie rare ! C’est en premier lieu un roman d’ambiance : imaginez la plus longue soirée de l’hiver, les flocons qui tombent dehors, le feu qui crépite à l’intérieur d’un grand hall de pierre où sont alignées quatre tables en bois, les hommes portent une épée à leur côté et la magie peut surgir à tout moment … Bienvenue sur le Wegg ! L’intrigue est quant à elle assez lente à se mettre en place (ce qui va plutôt bien avec la manière de savourer ce roman, au coin d’une cheminée) pour finalement aboutir à une enquête. Stig (personnage principal et héros très réussi au passage) va essayer de démêler les fils du destin pour élucider toutes ces morts. Et enfin, c’est aussi un roman initiatique magistral qui raconte le passage à l’âge adulte d’un adolescent pétri de doutes, mais qui au fond est plein d’espoir et de candeur. En cela, il rejoindra sans doute Le Garçon et la ville qui ne souriait plus.
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