BANDE-DESSINÉE — Surprise ! Avant d’être une bande-dessinée de plus de 150 pages, Sombres citrouilles est à l’origine un roman jeunesse de Malika Ferdjoukh. Forte du succès de son œuvre (lauréat du prix “Sorcières” en l’an 2000), elle revient aujourd’hui avec l’adaptation graphique par Nicolas Pitz de son huis-clos.
31 octobre. Comme tous les ans, toute la famille Coudrier est réunie à la Collinière, la grande demeure familiale nichée au cœur de la nature, entre forêts et étangs pour fêter l’anniversaire de Papigrand, le patriarche de la famille. Mais c’est aussi — bien évidemment — le jour d’Halloween. Et à cette occasion, Mamigrand a demandé à ses petits-enfants s’ils pouvaient aller au potager cueillir quelques citrouilles pour les voisins. Les cousins se mettent donc en route : Hermès, 14 ans, suivi des jumelles Annette et Violette, ainsi que le petit Colin. C’est donc en fin de matinée, les bras plein de cucurbitacées que la joyeuse troupe tombe nez à nez avec un cadavre. Et pas n’importe lequel puisqu’Hermès avait surpris une dispute le matin même entre cet inconnu et Papigrand. Les jeunes cachent le cadavre et ouvrent grand leurs oreilles : tout le monde devient suspect et les secrets sont éventés les uns après les autres … Sacrée famille !
Les débuts sont un peu laborieux : la faute à une intrigue compliquée et à des multitudes de personnages à mettre en place. Il faut donc quelques pages au lecteur pour prendre ses marques et assimiler les liens de généalogie parfois complexes. Mais une fois que la situation est posée, les pages se tournent à une vitesse folle. Et sous le couvert de trouver l’assassin, c’est une multitude de thèmes qui sont abordés. On voit tout d’abord le peu de communication qu’il y a dans cette famille (et qui est sans aucun doute à la base de la majorité de leurs problèmes). Quand les Coudrier sont réunis, on voit bien que personne ne s’écoute et que tout le monde y va de sa petite remarque désagréable. La bienveillance n’est donc pas de mise. Au fur et à mesure, on comprend que cet environnement guindé a conditionné les personnages : d’aucuns n’assument pas les origines sociales de leur conjoint, Mamigrand méprise sa petite-fille handicapée, et les troubles psychologiques sont encore une fois tabous. Mais la vérité finira par triompher, c’est certain.
Concernant les dessins, c’est une vraie réussite. Nicolas Pitz a choisi d’illustrer cette histoire dans un camaïeu de couleurs automnales tout à fait plaisant, ce qui donne le ton de l’histoire et renforce l’atmosphère. Les flash-backs sont quant à eux dans un dégradé de gris qui permet de facilement se repérer. Les scènes de nuit sont elles aussi habilement traitées : intégralement en noir, les contours sont néanmoins esquissés d’un trait fin et dégradé. Les décors sont soignés, foisonnants et plein de détails, pourtant leur lecture reste simple. Avec Nicolas Pitz, on découvre donc l’intérieur chargé et cossu d’une maison bourgeoise, les feuilles mortes des arbres en automne et les animaux de la forêt qui vont et viennent entre les cases.
Si vous aimez les sagas familiales et les secrets enfouis, Sombres citrouilles devrait vous régaler (que l’on soit en automne ou non !).
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