Le Maître des chagrins, tome 1 : Les Dieux silencieux

FANTASY — Ah, la fantasy ! Ce genre si riche et si éclatant, mais qui souffre parfois un peu de la comparaison avec … lui-même. Car il est difficile de se renouveler dans le paysage des littératures de l’imaginaire et le lectorat est connaisseur ! Qu’en est-il donc des Dieux silencieux : Le Maître des Chagrins ? Justin Call, leur auteur, a-t-il su tirer son épingle du jeu de la SFFF ? La réponse juste après !

Vous connaissez déjà cette histoire, c’est celle d’un orphelin élevé par un vieil homme sage, qui découvre qu’il possède des pouvoirs et apprend à s’en servir pour protéger le monde d’un grand mal. Mais qu’arriverait-il si ce héros et ce mal ne formaient qu’un ? Sauverait-il le monde, ou le détruirait-il ?
Annev a 17 ans, et son plus grand rêve serait d’accéder au statut d’Avatar à l’Académie où il étudie. Celle-ci est nichée au creux de Chaenbalu, un village secret dirigé par un ordre clérical où chaque Maître possède une mission qui lui est propre, et dont le but ultime est de retrouver tous les artefacts magiques. Mais Annev fait figure d’exception. Au contraire de ses camarades, qui furent dérobés à leurs familles dans la capitale lorsqu’ils n’étaient que des nourrissons, Annev est né dans le village de Chaenbalu et a été élevé par Sodar, le prêtre, après le massacre de ses parents. Pris en étau entre les idées déclinantes de son mentor et les maîtres de l’Académie, il doit choisir entre un avenir prometteur et ses amis proches. Chacune de ses décisions le mène à un nouveau dilemme, jusqu’à ce qu’il soit contraint de se lancer dans une quête qui lui est étrangère. Acceptera-t-il de s’engager sur une voie potentiellement dévastatrice ?

Qui dit “écrire un premier tome” dit “poser les bases”, bien évidemment ! Et ce livre ne fait pas exception : les premiers chapitres sont un peu décousus, voire même un peu clichés de prime abord, mais le récit trouve finalement assez vite son rythme et son ton. Car l’exercice est au final plutôt subtil : Justin Call se doit de rassurer son lecteur en utilisant des aspects familiers du genre tout en instillant assez de nouveauté pour aller dans la direction qu’il souhaite. Et pari réussi ! Si le concept de l’école de magie a déjà connu son heure de gloire, il est ici plutôt bien revisité. Car quoi de plus original qu’une école qui enseigne la magie pour mieux la faire disparaître … Et pour cela, les garçons sont aussi formés au combat et aux techniques plus ou moins avouables qui feront d’eux de bons espions. L’enseignement est également extrêmement religieux et on voit bien que l’ignorance des élèves est en fait au service des desseins de leurs professeurs, qui ont tous les pouvoirs. Les filles, même si elles n’ont pas le même statut que leurs camarades, jouent également un petit rôle et se montrent pleines de ressources ! On espère les découvrir un peu plus par la suite d’ailleurs.

Le thème inattendu et important du livre, c’est la gestion du handicap. Car dans ce monde, chaque personne présentant une infirmité est considérée comme maléfique, et est bien souvent tuée pour cette raison le plus tôt possible. Certains — comme Annev, à qui il manque un avant-bras — parviennent néanmoins à se cacher et à se fondre dans le décor grâce à des artefacts magiques. Mais c’est une double peine car la magie est en réalité très mal considérée et les artefacts rassemblés pour être mis sous contrôle. On apprécie donc les réflexions du personnage sur le sujet, son incompréhension face au regard des autres et comment il essaie d’accepter son corps.

Malgré quelques maladresses dans la gestion du rythme, on a hâte de découvrir le tome 2 pour se forger définitivement une opinion. En attendant, c’est plutôt prometteur !

Le Maître des chagrins, tome 1 : Les Dieux silencieux, Justin Call. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Nenad Savic. Bragelonne, août 2020.

Par Coralie

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