Le Livre de Phénix : magie, maux et dépaysement, bis !

SCIENCE-FICTION — Une nouveauté de Nnedi Okorafor ? On n’allait certainement pas rater ça !
Le Livre de Phénix est une préquelle à Qui a peur de la mort – et notez bien que les deux titres peuvent être lus indépendamment.

Phénix est une SpeciMen. Une expérience génétique parmi d’autres, née dans la Tour 7, à New York. C’est une “femme accélérée” : si elle semble avoir le corps et l’esprit d’une femme de 40 ans, elle est née seulement deux ans plus tôt, avec des capacités qui dépassent l’entendement. Isolée dans la tour, Phénix passe ses journées dans sa chambre, lit des livres numériques sur tous les sujets, fait du sport, et profite de l’amour de Saeed, un autre humain biologiquement modifié. Mais un soir, celui-ci est témoin de quelque chose de si terrible qu’il se suicide. Dévastée par sa mort et le refus du Grand Œil, l’organisme qui les a modifiés, de répondre à ses questions, Phénix commence à comprendre qu’elle est dans une prison. Une prison dont elle va s’évader.

L’histoire de Phénix se déroule dans un univers pas tout à fait post-apocalyptique, mais bien parti pour l’être. Guerres, famines, pandémies, catastrophes naturelles, robots tueurs en liberté… on ne peut pas dire qu’il fasse bon vivre sur Terre, dans une période qu’on imagine comme notre futur proche. Aucune indication de temps n’étant donnée, le récit pourrait se dérouler à n’importe quel moment, ce qui lui donne une ambiance intemporelle, et donc une portée universelle.

Le départ du récit semble vouloir mêler intrigue anticipative et réflexions philosophiques, sur un rythme qui peut sembler lent, mais qui s’attache en fait à planter le décor et les enjeux de l’intrigue. Passé ce temps introductif (assez long), Phénix se lance dans l’action. Et celle-ci passe par la destruction, comme le laissait supposer son patronyme. Mais aussi par l’apprentissage, car Phénix devra apprendre de nombreuses choses : comment maîtriser son pouvoir, comment apposer sa patte dans le monde, comprendre comment fonctionnent les hommes, et bien d’autres éléments. Le récit étant narré par elle, nous suivons toutes ses pensées, ses évolutions, ses révélations. Malgré la portée universelle, le récit a un côté très intimiste, qui le rend aussi très prenant.

Bien que la structure du récit soit assez linéaire (Phénix enchaîne les voyages et les temps où elle se pose), l’enchaînement est parfois un peu confus et le fil rouge un peu ardu à suivre. C’est peut-être aussi dû à la nature du roman, qui mêle science-fiction, un brin de fantasy, réflexions politiques et philosophiques, dimension poétique confinant au mythe : ces derniers points l’emportent assez vite sur le reste, et on profite d’un texte complexe et puissant !

Une fois de plus, Nnedi Okorafor sert un texte dense et prenant, qui suscite de nombreuses pistes de réflexions. Que l’on peut aisément poursuivre avec Qui a peur de la mort !

 

Le Livre de Phénix, Nnedi Okorafor. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Erwan Devos et Hermine Hémon. Actusf, 17 juin 2022. 

A propos Oihana 711 Articles
Lectrice assidue depuis son plus jeune âge, Oihana apprécie autant de plonger dans un univers romanesque, que les longues balades au soleil. Après des études littéraires, elle est revenue vers ses premières amours, et se destine aux métiers du livre.

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