Le Silence des carillons : dark academia sauce post-apo !

FANTASY — Lauréat du prix de la dédicace la plus lente, Edouard H. Blaes est aussi un rêveur à plein temps, qui cherche la solution pour faire entrer 39h dans les 24 couramment dévolues à des journées mal conçues. Pour survivre à un univers trop sérieux pour lui, il écrit dans les interstices qu’il trouve. Ses nouvelles ont déjà été primées du Prix Imaginales et du prix spécial du jury de l’école d’écriture de Cécile Duquenne.
Après ces débuts très prometteurs, il est temps de se pencher sur son premier roman publié, Le Silence des carillons !

Ermeline Mainterre s’est promis de devenir une magicienne dont chacun connaîtrait l’existence et, pour cela, elle ne reculera devant rien.
À Tinkleham, la lumière du soleil ne traverse jamais la Brume qui cercle la ville. Les mages du Beffroi apprennent à manier les carillons pour repousser les terribles Spectres, issus de la Brume, et qui font disparaître les habitants sans laisser la moindre trace. Douée de quelques talents magiques, Ermeline a choisi cette voie, et compte bien devenir la meilleure magicienne de tous. Lorsqu’elle est acceptée en première année d’études au Beffroi, c’est l’euphorie. Ermeline réussira-t-elle à graver son nom dans l’Histoire ? Jusqu’où ira-t-elle pour devenir inoubliable ?

Edouard H. Blaes nous entraîne dans un univers post-apocalyptique qui fait froid dans le dos : suite à une surexploitation des sols, la ville de Tinkleham s’est trouvée irrémédiablement ceinte d’une écharpe de Brume, dont s’échappent quelque fois des Spectres meurtriers. De la naissance de la Brume ou de l’apparition des Spectres, on ne saura rien, seulement qu’ils sont là, et qu’il faut s’y adapter coûte que coûte. Ayant grandi en Bordure, dans l’usine de moteurs de son père, Ermeline ne rêve que du Centre et de magie, deux éléments qui interviennent assez tôt dans le récit.
Et justement, passée une découverte un peu abrupte (pour l’héroïne) des réalités de la grande ville, l’intrigue nous entraîne bien vite sur les bancs de l’école de magie, où Ermeline apprendra à manier les chants et les carillons pour repousser les spectres, et peut-être réaliser son rêve !

Et contrairement à ce qu’on aurait pu attendre, l’auteur nous emmène vers des sentiers inusités. De magie, il sera dans un premier temps très peu question, Ermeline subissant plutôt des matières générales, et tentant de nouer péniblement des relations avec ses congénères. Lorsque la magie intervient enfin, Ermeline s’aperçoit… qu’elle est plutôt mauvaise. Avec ça, son amie la plus proche n’a d’yeux que pour un bellâtre sans intérêt. En clair, rien ne va. Et plus le récit avance, plus l’on sent monter la colère d’Ermeline, choriste sans avenir, mise à l’écart par ses amis, sans doute dédiée à rater sa vie dans les couloirs sombres d’un Beffroi qu’elle en vient à exécrer de plus en plus. C’est sur cette bonne atmosphère que survient la première incursion de Spectre dans le Beffroi… et le premier meurtre.
En peu de temps, l’auteur fait grimper la tension qui régnait déjà au sein du Beffroi et nous entraîne dans un récit de plus en plus sombre, qui pousse l’ambiance dark academia dans ses retranchements et va vite basculer dans le récit de survie. Et à partir de là… on peut dire que tous les coups sont permis.

L’évolution des personnages est d’ailleurs assez spectaculaire. Alors que le roman commence comme un récit qui ressemble à s’y méprendre à la de school fantasy, avec son lot d’ados et de jeunes adultes (dont certains mériteraient des claques, évidemment), on se retrouve assez vite face à une ambiance qui va obliger les personnages à grandir très vite… et à faire des choix. Or, ceux-ci ne sont pas toujours ce qu’on aurait aimé, ou ce que l’on aurait attendu d’eux. Choix contestables, prises de positions difficiles à justifier… l’auteur place ses personnages sur la sellette, et le lecteur avec – car après tout, qui peut dire ce qu’il aurait fait dans une telle situation sans l’avoir vécue ? C’est très bien fait, c’est prenant, et sous ces dehors de lecture divertissante, mine de rien, on s’interroge sur un tas de sujets qui sont intelligemment traités.

En somme, cette première plongée dans l’œuvre d’Edouard H. Blaes était une réussite. Avec Le Silence des carillons, il signe un one-shot de fantasy sombre, prenant et parfaitement mené, qui lorgne autant du côté de la survie que de la dark academia. On guettera ses prochaines parutions avec attention !

Le Silence des carillons, Edouard H. Blaes. Actusf, 22 février 2023. 

A propos Oihana 710 Articles
Lectrice assidue depuis son plus jeune âge, Oihana apprécie autant de plonger dans un univers romanesque, que les longues balades au soleil. Après des études littéraires, elle est revenue vers ses premières amours, et se destine aux métiers du livre.

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