Amara, Clodia : portraits de femmes dans la Rome Antique !

Clodia / La Maison à la porte dorée

HISTOIRE — Les héroïnes de La Maison à la porte dorée et de Clodia n’ont pas grand chose en commun, si ce n’est d’être des femmes dans l’empire romain au premier siècle avant JC : l’une est née grecque libre puis a été esclave et prostituée, l’autre est née patricienne et est épouse d’un homme de premier plan. Ces deux profils nous permettent, en deux lectures, de découvrir la condition féminine dans la Rome d’antan, à deux extrémités du spectre de la féminité de l’époque !

Et celle-ci n’a rien de reluisant. Prenons le cas d’Amara, héroïne de L’Antre des louves puis de La Maison à la porte dorée : esclave et prostituée, puis courtisane soumise au bon vouloir de son amant, la jeune femme dépend totalement des hommes pour assurer sa survie, et son corps est sa meilleure arme. À l’autre extrémité de la société romaine, Clodia fait finalement le même constat : elle se définit par son père, puis son frère et enfin son mari. Son corps et ses capacités reproductrices, couplés à son ascendance prestigieuse, sont ses seules valeurs aux yeux du patriarcat. Les deux rêvent de s’affranchir de cette tutelle masculine : mais le pragmatisme est au coeur des deux récits.

Dans Clodia, Sophie Malick-Prunier s’empare d’un fait divers qui a secoué la Rome de l’époque de Jules César : le scandale de la bonne déesse. Un homme, le frère de Clodia, s’est introduit au sein de la demeure de César pour observer un rite religieux interdit aux hommes. L’affaire devient politique, et s’envenime : telle Anne Boleyn bien des siècles plus tard, Clodia est même accusée d’entretenir des relations contre nature avec son propre frère ! C’est un roman très politique, qui nous plonge dans les arcanes du Sénat, et nous dévoile les ambitions et les frustrations des puissants. De nombreux grands noms de l’époque parleront aux férus d’histoire : Jules César, Cicéron, Pompée…

Dans La Maison à la porte dorée, Elodie Harper continue la description de Pompéi juste avant le drame amorcée avec l’excellent premier tome L’Antre des louves : Amara a réussi à obtenir sa libération mais son statut reste extrêmement précaire. Même s’il s’ouvre sur l’ivresse de sa liberté retrouvée, ce nouveau roman est doux-amer, et même franchement douloureux par moment. Amara se sent plus prise au piège que jamais et sa vie va prendre un tournant inattendu. Le roman porte un regard sans concession sur les failles de la société romaine : son machisme omniprésent, et l’horreur de l’esclavage.

Voici deux très bons romans pour qui aime l’histoire et en particulier l’Antiquité : tous deux ont le point commun de nous transporter à la même époque, dans deux grandes villes italiennes, Rome et Pompéi, où deux femmes d’exception émergent au fil du récit. Il ne nous reste plus qu’à trouver un roman sur le destin d’une prêtresse à la même époque, et nous aurons un panorama complet de la vie féminine sous César. À lire !

La Maison à la porte dorée, Elodie Harper. Calmann-Lévy, mai 2023. Traduit de l’anglais par Manon Malais.

Clodia ou le scandale de la Bonne Déesse, Sophie Malick-Prunier. Robert Laffont, mars 2023.

A propos Emily Costecalde 1036 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

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